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Automne

Novembre 2017

NaNoWriMo arrangé : une nouvelle par jour pendant un mois

Je me fais belle, je me prépare. Je me suis gorgée de sève tout l’été. Ma vie sera courte, mais je compte bien partir en beauté. Autour de moi, c’est l’effervescence. Toutes choisissent leurs couleurs. Ça se bat, ça se chamaille pour une teinte ou une nuance. Pour ma part, j’ai déjà choisi, depuis le début déjà je suis sûre de moi. Le vert tendre, presque jaune, du printemps, ça ne m’intéresse pas. Le vert sombre du milieu de l’été, très peu pour moi. Je sais bien que je dois en passer par là, ce n’est pas le problème. Mais au fond, ce n’est pas à ça que je suis destinée. Moi, ma couleur sera l’orange. 

Attention, pas un orange maladif, taché de marron. Pas une teinte pâlichonne et sans saveur. Non un vrai orange, éclatant de chaleur. Orange feu, orange flamme. Je veux qu’on me remarque. Je veux être celle dont on se souvient. Celle qui illuminera mon arbre. Celle que les enfants ramasseront et garderons précieusement dans un herbier. 

Alors je me prépare. Je peaufine ma couleur. Teinte par teinte, un reflet après l’autre je me transforme. Peu à peu le vert cède sa place. Ça y est, je me sens belle, je me sens moi ! Ça y est, mes voisines peuvent enfin prendre la mesure de mon éclat. Ma mue se termine, je suis plus flamboyante que jamais. Je suis vive, piquante, radieuse. Je suis vivante. Je n’ai plus qu’à attendre mon tour. 

Odeur de mousse et de feu de bois. Comme une humidité dans l’air. Goût de champignons et de châtaignes. Il est temps pour moi d’entrer en scène. Je l’avoue, maintenant que le grand jour est arrivé, je suis un peu nerveuse. Je ne veux pas partir la première. J’attends patiemment le bon moment. Je m’accroche encore un peu, je profite des dernières brises. Je jette un regard timide en bas. Le sol commence à se recouvrir de mille couleurs. Bientôt, je viendrai ajouter la mienne à ce tableau éphémère. 

Je m’imagine avec elles, toutes ces feuilles qui ont lâché prise avant moi. Je m’imagine au milieu d’elles, décorer le sentier. Je m’envolerai lorsque les enfants viendront jouer. Je suivrai le vent lorsqu’il se mettra à souffler. Je le sens, ça y est, c’est le moment. Une dernière hésitation, puis je me laisse tomber. La peur s’efface. Exaltation. Je virevolte, je tournoie. Je dessine le plus beau des ballets. Un salto, une ultime pirouette, et je me pose délicatement sur le sol. Ma place est trouvée. 

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