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Traqueur

Novembre 2017

NaNoWriMo arrangé : une nouvelle par jour pendant un mois

Un regard à droite, un à gauche. Personne. La lande était entièrement dégagée, il ne courait aucun risque. D’un geste précis, il dessina dans le sable le symbole convenu. Un cercle noir apparut dans les airs. Il n’hésita pas une seconde, s’avança, le franchit, et disparut. Une seconde plus tard, cercle et symbole s’étaient évaporés à leur tour. 

Il restait sur le qui-vive. Le moment du passage était toujours le plus compliqué. Il était désorienté pendant une dizaine de secondes, un laps de temps largement suffisant pour se faire attaquer. Heureusement, sa planète d’arrivée paraissait calme. Il reprit ses esprits, ses réflexes de traqueur et analysa son point de chute. C’était une vaste clairière, paisible, au beau milieu d’une forêt verdoyante. Il n’y avait a priori aucun danger dans les environs, et donc aucune raison que le symbole l’ait envoyé ici. 

Il voulut repartir, certain que le guide s’était trompé, mais un bruit dans les buissons l’arrêta. Ce n’était probablement rien, juste un animal sauvage, mais puisqu’il était sur place, autant en avoir le coeur net. A pas lents et discrets, il s’approcha de l’origine du bruit. Un chevreuil jaillit des fourrés, affolé. Si le traqueur avait encore eu des émotions, il aurait probablement éclaté de rire. A la place, il regarda l’animal s’éloigner et fouilla les environs à la recherche d’une nouvelle proie. 

Plus rien ne bougeait. Le calme était revenu dans la forêt. Décidément, cette mission n’avait aucun intérêt. A moins que le danger se situe ailleurs sur la planète ? Mais dans ce cas, comment le trouver ? En général, le guide se débrouiller pour le faire apparaitre à l’endroit adéquat, ou au moins lui laisser un indice. 

Mais peut-être y en avait-il un qu’il n’avait pas su lire ? Autour de lui, rien d’anormal, rien qui ne frappe son attention, rien qui ne choque son oeil exercé. Dans ce cas, l’indication devait se trouver au dessus de lui. Il choisit l’arbre le plus haut, le plus large, celui dont les branches épaisses seraient les plus aptes à supporter son poids. Il enserra le tronc et, centimètre par centimètre, d’abord à la force seule des bras puis en prenant appui sur les branchages, il réussit à s’élever jusqu’à la cime. Là, bien au dessus de la frondaison, dégagé de la voûte verdoyante des feuilles, il comprit. 

L’Ouest était entièrement bouché par une épaisse fumée noire. Une de ces fumées qui ne présageait que des problèmes. Le traqueur descendit de son perchoir si vite qu’il s’en laissa presque tomber. Sans la moindre hésitation, il se précipita en direction de la fumée. Il savait qu’il était trop tard, qu’ils étaient déjà repartis. Mais s’il restait le moindre espoir, la moindre chance, il devait la saisir. 
Les buissons lui fouettaient les mollets, les branches basses lui giflaient le visage mais ne réussirent pas à l’arrêter pour autant. Il lui sembla courir à ce rythme effréné des heures durant avant qu’enfin, enfin il n’arrive à destination. Il sentit l’odeur acre et lourde de la fumée bien avant d’en voir les dégâts. 

Lorsqu’il déboucha de la forêt, il se tenait au sommet d’un talus en contre-bas duquel s’étalait une ville. Plus précisément, s’était étalée. Il n’en restait rien. Ce que les Prédateurs n’avaient pas détruit, le feu s’en était chargé. Ce n’était plus qu’un vaste champ de ruines, parsemé de cratères encore cramoisis. La signature des Prédateurs. 

Le traqueur vérifia son détecteur. Il était muet. Les Prédateurs avaient déjà disparu vers d’autres contrées. Il récita une rapide prière aux entités du cosmos pour leur confier les âmes de ceux que, cette fois encore, il n’avait pas pu sauver. Mais son combat était loin d’être terminé. Il avait renoncé à son identité, renoncé à son nom, renoncé à ses émotions, renoncé à sa vie pour la Traque. Il les retrouverait. Ils avaient de moins en moins d’avance sur lui. Et le jour béni où il se retrouverait enfin face à eux, il les détruirait, un par un, en citant chacune des planètes qu’ils avaient contribué à dévaster. 

Le traqueur dessina un nouveau symbole dans la terre mêlée de cendres. Il enclencha son pisteur, passa à nouveau le grand cercle noir et disparut dans un autre recoin de la galaxie. Jamais il ne renoncerait à sa quête.

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